Depuis quelques années, Zaha Hadid redessine la Chine de demain. Après l’Opéra de Canton, le centre d’art de Chengdu et des centres commerciaux à Pékin et Shanghai, la «starchitecte» d’origine irakienne a récemment posé sa marque sur le Galaxy SOHO, un vaste complexe au design futuriste qui semble tout droit sorti d’un film de science-fiction.
Même selon les normes de Pékin, le complexe de béton a de quoi impressionner. Lors de l’inauguration en octobre dernier, Zaha Hadid a dit s’être inspirée des dunes, rivières et autres caractéristiques naturelles du paysage chinois pour concevoir le projet. Le résultat? Quatre bâtiments fluides en forme de dôme, tout en courbes, reliés par des ponts aux formes organiques.
Pour Zaha Hadid et son armada d’architectes – elle en emploie plus de 350 -, la complexité résidait dans les dimensions du bâtiment: 330 000 mètres carrés d’aluminium et de verre isolé. Il fallait «trouver une nouvelle façon de créer une grande masse, puis de la briser. Un peu comme prendre un rocher et le découper, avec des strates et des lignes de contour comme une chaîne de montagnes», a expliqué la maître d’oeuvre du projet. Pari gagné puisqu’en regardant rapidement l’édifice composé de volumes distincts, on pourrait croire la façade en mouvement.
Au rez-de-chaussée, les grandes cours intérieures sont le reflet de l’architecture chinoise traditionnelle, avec des espaces ouverts en continu. Puis, les commerces occupent les trois étages inférieurs, tandis que les espaces de bureaux sont aux suivants. Au sommet, bars et restaurants permettent de profiter d’une vue panoramique sur la ville.
L’édifice de 15 étages a reçu la certification LEED Argent pour ses différentes caractéristiques vertes, comme l’utilisation de l’éclairage naturel et son enveloppe étanche qui retient la chaleur.
Entre Hadid et la Chine, c’est l’amour
L’architecte irakienne n’en est pas à ses premières armes en Chine – ni dans le reste du monde d’ailleurs. Le pays occupe une place importante dans le coeur de Zaha Hadid depuis son premier voyage en 1981. Sa firme est ainsi engagée dans plus de projets en Chine que nulle part ailleurs.
En octobre, devant plusieurs milliers de Chinois, elle a affirmé: «Nous avons toujours pensé que nous pouvions faire quelque chose d’extraordinaire ici. Maintenant, c’est le bon moment, et c’est le bon endroit.»
À 62 ans, Zaha Hadid est l’une des seules femmes à figurer au panthéon des architectes. D’origine irakienne, elle travaille aujourd’hui à Londres, sur des dizaines de projets à la fois.
On lui doit certaines des réalisations les plus audacieuses des dernières années, comme le Centre aquatique des Jeux olympiques de Londres en 2012, le musée Guggenheim de Taïwan, les tours Signature de Dubaï ou encore le musée Riverside de Glasgow.
En 2004, elle a été la première femme à recevoir le prestigieux prix Pritzker (l’équivalent du Nobel pour l’architecture). La reconnaissance couronne l’une des plus grandes architectes du déconstructivisme, un mouvement qui refuse la trop grande rationalité et l’ordre linéaire de l’architecture moderne.
Bien qu’elle ait longtemps été dédaignée, plus rien ne semble pouvoir arrêter Zaha Hadid, qui a le vent dans les voiles et toujours plus de projets dans ses cartons. La Presse l’a questionnée au sujet de son parcours.
Quels sont les défis d’être une femme architecte?
C’est un métier très ardu. Peut-être que c’est mon caractère flamboyant plutôt que le fait d’être une femme qui m’a donné une telle détermination à réussir. J’ai toujours été extrêmement déterminée. Maintenant, j’ai un certain succès, mais ça a toujours été un combat.
On voit de plus en plus de femmes architectes établies et respectées, et 50% des étudiants en première année d’architecture sont des femmes. Cela ne signifie pas que c’est facile. Mais au cours des 15 dernières années, il y a eu d’énormes améliorations.
Quel type de projets préférez-vous?
Quelle question difficile! Je suis incapable de choisir. Chacun de mes bâtiments représente un nouveau défi. C’est comme demander à un parent qui est son enfant préféré!
C’est toujours très gratifiant de voir un projet ambitieux devenir réalité. Après de nombreuses années de travail sur un projet, j’en connais tous les détails. Mais ce qui demeure stimulant, c’est que peu importe combien de temps je dessine et redessine un bâtiment, il y a toujours des moments fascinants et inattendus en cours de projet. Je ne peux pas tout prévoir et j’ai chaque fois un sentiment de découverte.
Vous avez créé des bâtiments partout dans le monde. Avez-vous déjà travaillé au Canada?
Oui, j’ai déjà participé à plusieurs concours d’architecture au Canada. J’aimerais beaucoup y construire un projet, un jour.